Afin de combler un déficit, estimé à cent millions d’euros, le Ministère de l’Education nationale a pris le parti de ponctionner les fonds de roulement des universités ou établissements qui ont un excédent de recettes par rapport à leurs dépenses, et d’aider de cette façon les établissements en situation plus difficile.
QSF conteste cette mesure, à la fois injuste, contreproductive, et probablement illégale.
Cette décision pénalise les universités qui ont su, dans la situation que leur a léguée la LRU, trouver de meilleurs modes de gestion. Contrairement à ce que dit la ministre, les fonds de roulement ne sont pas nécessairement de l’argent « dormant dans les réserves des universités ». En plus de répondre à l’obligation réglementaire de 30 jours de fonds de roulement, à quoi s’ajoute l’incitation du ministère à « renforcer » ces fonds, ils peuvent constituer des réserves pour des dépenses imprévues (litiges, par exemple) tout comme ils peuvent être abondés par des sommes versées à l’avance au tire des contrats européens (ERC, PCRD, etc.) destinés à réaliser des programmes fléchés. Enfin, ils peuvent aussi servir à des opérations pluriannuelles d’investissement, de rénovations de locaux et de contrats de recherche sur le moyen et le long terme – autant d’exigences que l’État peine aujourd’hui à remplir.
QSF déplore aussi l’autoritarisme dont l’État a fait preuve dans cette décision, qui peut être assimilée à un véritable « fait du prince », en décidant unilatéralement de ponctionner des sommes aux universités sans qu’ait été engagé le moindre dialogue, ni effectuée la moindre vérification. Les universités touchées n’ont eu droit pendant des mois qu’à de simples bruits de couloir, avant que leurs présidents réussissent à obtenir quelques informations par téléphone, pour apprendre l’amputation de leur dotation de l’année 2015. Ces décisions interviennent à une époque tardive, alors que les fonds de roulement sont pour partie déjà engagés, obligeant ainsi les universités à revoir au dernier moment leurs projets d’investissement, voire leurs dépenses de fonctionnement. Elles ne tiennent pas plus compte du déficit, quelque fois criant, de certaines de ces universités en terme de personnel.
QSF critique aussi le caractère contreproductif de cette décision. Le ministère affirme officiellement vouloir accroitre la qualité générale du service public et faire des universités non de simples opérateurs de l’État, mais des acteurs économiques. En réalité, il pénalise les universités qui ont fait un effort pour accroitre leurs ressources en dépensant mieux et en accroissant leurs recettes par des partenariats avec le monde économique – et ce, souvent même, dans des disciplines où la chose apparaît à d’autres impossible. Tout en revendiquant haut et fort le principe de « l’autonomie des universités », l’État ne cesse en réalité d’accroître son dirigisme à tous les niveaux, pédagogique comme financier. Les universités ne sont pas plus maîtresses de leurs modes de recrutement et de sélection que de leurs recettes et leurs dépenses, et de la façon dont elles les gèrent.
Une telle mesure enfin incite les universités les moins rigoureuses dans leur gestion à continuer en ce sens et sanctionne celles qui tentent de gérer de façon plus saine leurs propres budgets. Il convient d’ajouter qu’elle est purement conjoncturelle, et qu’elle ne résout nullement les problèmes structurels qui ont occasionné ces déficits : tant que ces problèmes n’auront pas été réglés, il est permis de penser que cette ponction sera répétée, voire amplifiée.
Il n’est d’ailleurs pas du tout certain que la légalité d’une telle mesure, qui contredit de façon si manifeste le principe de l’autonomie des universités, passe l’épreuve d’un contrôle par la juridiction administrative.
Enfin, QSF ne peut que s’étonner de la passivité de la Conférence des présidents d’Université. Elle rappelle que la CPU que sa stratégie ne saurait se fonder sur des considérations politiciennes et qu’elle a pour mission de défendre les intérêts de toutes les universités, et non seulement de certaines d’entre elles à l’exclusion des autres.