Le ministère de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation a fait de la concertation avec les organisations représentatives une méthode de travail que QSF a appréciée. QSF n’a pas été en revanche consulté au sujet de l’arrêté qui fixe le cadre national de la « formation visant à l’approfondissement des compétences pédagogiques des maîtres de conférences stagiaires ». Cet arrêté, daté du 8 février 2018 et publié le 6 mars, prévoit dans son article 1 une « formation obligatoire dispensée aux maîtres de conférences, pendant leur année de stage. […] Cette formation vise à l’approfondissement des compétences pédagogiques générales ou spécifiques au champ disciplinaire nécessaires à l’exercice du métier d’enseignant-chercheur. » L’article 3 précise que la « composante ou le service chargé de cette formation délivre un avis sur le suivi de la formation par le stagiaire. Cet avis est porté à la connaissance du stagiaire avant sa transmission au conseil académique ou à l’organe en tenant lieu, préalablement à la titularisation. »
QSF regrette qu’un texte qui touche indirectement au statut des enseignants-chercheurs n’ait été soumis qu’à l’avis du comité technique des personnels enseignants titulaires et stagiaires de statut universitaire et qu’il n’ait pas fait l’objet d’une concertation plus large avec les organisations représentatives.
QSF estime d’abord que ce texte est dépourvu d’objet pour la plupart des maîtres de conférences stagiaires, qui, en général, ont déjà assuré des cours dans l’enseignement supérieur. QSF considère ensuite qu’une formation spécifique pourrait en effet aider les maîtres de conférences stagiaires qui n’auraient aucune expérience de l’enseignement supérieur à mieux maîtriser la transmission du savoir. Toutefois, pour QSF, une telle formation devrait se faire exclusivement sur la base du volontariat et surtout ne pas donner lieu à un avis émis par une composante ou un service dont les contours ne sont pas définis par l’arrêté. Ces composantes ou services n’ont ni les fonctions d’un comité de sélection, ni la légitimité d’un conseil académique, ni la mission d’évaluation confiée au CNU.
QSF craint que le caractère imprécis de l’arrêté ouvre la porte à des tentations “pédagogistes” qui modifieraient la nature et la mission de l’enseignement supérieur et pourraient se traduire par un alignement du statut des maîtres de conférences sur celui des professeurs du secondaire. Que la mise en œuvre de la formation soit définie « par l’établissement en fonction de sa stratégie de formation et de sa politique éventuelle de mutualisation avec d’autres établissements » semble, par ailleurs, subordonner la liberté d’enseignement, qui est une liberté individuelle, à un cadrage collectif. Il est essentiel que l’enseignement supérieur ne soit pas assujetti aux contraintes et aux contrôles, souvent tatillons, auxquels est soumis l’enseignement secondaire.
QSF souligne enfin le caractère prescriptif de l’article 5, précisant que les « actions de formation des maîtres de conférences stagiaires sont prises en compte dans le cadre de l’évaluation de la stratégie, de la gouvernance et du pilotage de l’établissement. » Une telle indication, qui sonne comme une injonction adressée aux présidents d’université, semble empiéter sur les prérogatives du Hcéres, autorité administrative indépendante qui ne relève pas de l’autorité gouvernementale, et donc du contenu d’un arrêté.
QSF demande qu’une circulaire ministérielle précise le cadre juridique et formel de ces formations et que les sections du CNU soient associées à une réflexion sur ce que l’on entend par « compétences pédagogiques générales ou spécifiques au champ disciplinaire nécessaires à l’exercice du métier d’enseignant-chercheur » (art. 3).
QSF déplore la tendance lourde de la bureaucratie ministérielle à vouloir, par des voies parfois détournées, “secondariser” l’enseignement supérieur. Notre association continuera de défendre, contre ce genre de dérive, le lien indissoluble entre recherche et enseignement, constitutif de la mission universitaire. Les libertés académiques relèvent d’un principe constitutionnel et ne sauraient être remises en cause, même partiellement, par un arrêté.