J’ai lu avec beaucoup d’intérêt le communiqué de l’association QSF concernant la composition des comités de sélection : https://www.qsf.fr/2023/10/22/la-composition-des-comites-de-selection-une-decision-recente-et-hautement-contestable-du-conseil-detat/
C’est un collègue qui a attiré mon attention sur une dépêche d’AEF Info qui reprenait votre communiqué.
Sa lecture m’a soulagé : je suis le membre du comité de sélection dont la présence a motivé l’annulation du Conseil d’État, et cette décision me met très mal à l’aise.
Le communiqué de QSF est une vraie bouffée d’oxygène. La décision du Conseil d’État m’a choqué car elle remet en cause ma probité.
Elle me désempare aussi et me met très en colère. Je suis aussi très fustré de n’avoir jamais été contacté par un avocat ou un membre du Conseil d’État pour apporter des précisions qui auraient pu éclairer le jugement.
Je me permets de partager quelques éléments d’information avec vous, dans le cas où cela serait utile pour la suite.
J’ai en effet co-encadré la thèse de M. ** (la principale victime de ce jugement) soutenue en 2010 sous la direction de M. ***, à l’université XXX.
Après sa soutenance, M. ** a tout de suite quitté cette université pour d’abord travailler chez Orange Labs et il a ensuite obtenu un poste de MCF à l’université XXX, je pense en 2012.
J’ai obtenu ma mutation à l’université XXX (il se trouve que je suis originaire de la région et que les laboratoires travaillant [sur] mon domaine d’expertise, se comptent sur les doigts de la main) en 2019.
Entre 2012 et 2019, je n’ai co-publié qu’un seul article avec M. ***, et il s’agissait d’un article dans lequel j’avais surtout collaboré avec un de ses doctorants (l’article comporte 5 auteurs).
J’ai ensuite été co-auteur de 2 autres articles avec M. ***. Pour nuancer cela, si nous regardons mes publications sur HAL, nous pouvons voir j’ai été co-auteur de 56 articles depuis 2019. Sur l’ensemble de ma carrière, d’après HAL, j’ai co-écrit plus de 170 articles avec 120 personnes différentes. J’ai aussi dirigé ou co-encadré la thèse d’une vingtaine de personnes.
J’ai pris la direction du XXX en mai 2020, à la sortie du 1er confinement lié au Covid-19. Soit quelques mois après ma mutation et moins d’un an avant le concours annulé par le Conseil d’État. Ainsi, M. ** n’a été membre du [laboratoire X] sous ma direction que quelques mois. En tant que directeur du [laboratoire X], j’aurais plutôt eu envie de conserver M. ** qui est un très bon élément plutôt que de pousser à son recrutement à [l’Université XXX].
Il candidatait d’ailleurs lors de la même campagne sur un poste de PR à [l’université XX]. Je présidais ce comité de sélection local et il n’a pas obtenu le poste. De mémoire je crois qu’il a été classé 4e.
En ce qui concerne ma participation au jury d’HDR, je ne vois pas quel conflit d’intérêts cela pourrait souligner. J’ai participé à une cinquantaine de soutenances de thèse ou d’HDR : suis-je en conflit d’intérêts avec ces candidats parce que j’ai évalué leur travail ? C’est un non-sens.
Enfin, je n’avais rien caché à l’université de [XXX], tout s’est fait en totale transparence et j’ai appliqué les consignes à la lettre.
Dans le futur, j’envisage de refuser toute sollicitation à participer à un comité de sélection.
Le domaine dans lequel je travaille est très petit en France, et le risque est trop élevé que ma présence soit néfaste à un candidat. J’ai dirigé 2 laboratoires d’informatique, collaboré avec un très grand nombre de chercheurs, y compris de jeunes chercheurs d’autres laboratoires, j’ai encadré une vingtaine de thèses et participé à une cinquante de soutenances. Cela multiplie les risques de situations délicates au vu de la législation actuelle.
Et je n’apprécie guère que ma probité et mon honneur soient bafoués de la sorte alors que j’essaie de faire mon travail le plus consciencieusement possible.
Je vous remercie de m’avoir lu. Je suis à votre disposition si cela pouvait être utile.
Bien à vous,