À l’occasion des « Rencontres universitaires de la francophonie », le Premier ministre a annoncé le 19 novembre une augmentation des droits d’inscription pour les étudiants extracommunautaires. Ces droits passent de 170 € à 2 770 € pour la Licence et de 242 € à 3 770 € pour le Master.
Cette mesure, qui n’a fait l’objet d’aucune concertation, et qui va à l’encontre de ce que préconise la Cour des comptes dans son rapport sur les droits d’inscription (https://www.ccomptes.fr/sites/default/files/2018-11/20181123-droits-inscription-enseignement-superieur.pdf), est pour QSF injuste et contre-productive. La présenter dans le cadre d’un plan gouvernemental intitulé « Bienvenue en France », qui prétend avoir comme objectif l’amélioration de l’attractivité des universités françaises, constitue une erreur de perspective, de prospective et de timing. Elle apparaît de surcroît comme une sorte de provocation à l’encontre des pays francophones et risque de mettre à nouveau le feu aux poudres dans les universités françaises.
QSF est hostile à une mesure qui défie le bon sens. Ce n’est pas en augmentant les droits d’inscription d’étudiants venant pour l’essentiel d’Afrique (45 %), que l’on améliorera l’attractivité didactique et scientifique de nos universités. Ce n’est pas en multipliant par 16 ou 17 les droits d’inscription des formations universitaires que l’on atteindra l’objectif affiché de 500 000 étudiants étrangers en France d’ici à 2027, contre les 324 000 actuels.
Malgré le triplement annoncé des bourses et des exonérations pour critères sociaux, plus de 100 000 des 133 000 étudiants extracommunautaires concernés par l’augmentation des droits seraient assujettis à ces frais. Or, comme le souligne le rapport de la Cour des comptes, le « produit escompté d’une éventuelle augmentation des droits d’inscription pour les étudiants étrangers doit être comparé à l’apport de ces derniers à l’économie française, évalué à environ 1,7 milliards ». L’éviction probable de 30 000 ou 40 000 étudiants extracommunautaires à cause de l’augmentation des droits d’inscription risque de comporter une diminution considérable de l’apport de ces étudiants à l’économie française, rendant le solde comptable de l’opération nul, voire négatif.
L’augmentation des droits d’inscription apparaît donc comme une mesure inique et improvisée, qui ne favorisera pas l’attractivité des universités française et qui aura comme effet vraisemblable une dégradation de l’image et de l’influence de la France à l’étranger, notamment dans le monde francophone. QSF rappelle que l’attractivité nationale et internationale des universités ne se mesure pas au montant de leurs droits d’inscription, autrement l’Allemagne, où l’accès à l’université est globalement gratuit pour tous les étudiants, ne serait pas en train de rattraper et dépasser la France en ce qui concerne le nombre d’étudiants étrangers, notamment asiatiques. La qualité d’un service ne dépend pas du prix que l’on fait payer aux usagers mais d’abord des prestations qu’on leur offre. Augmenter les droits d’inscription, avant même de pouvoir offrir une offre de formation et des conditions d’étude et de recherche dignes de ce nom, est aussi un contresens qui peut se révéler lourde de conséquences. Seule l’amélioration de la qualité de l’offre universitaire pourra favoriser une attractivité plus large, plus durable et plus importante.
QSF demande que l’augmentation des droits d’inscription soit suspendue et que le Gouvernement tienne compte des recommandations de la Cour des comptes. QSF estime que les responsables politiques et les organisations représentatives doivent aborder le problème du modèle économique de nos universités, y compris des conditions didactiques et financières de l’accès à l’enseignement supérieur des étudiants étrangers (attendus, bourses, droits d’inscription, exonérations, etc.). QSF invite donc la ministre de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation, qui a voulu faire de la concertation une méthode de travail, à organiser dès janvier 2019 une réflexion sur la question des droits d’inscription de tous les étudiants, qui permette d’aborder l’ensemble des mesures pouvant favoriser l’attractivité des universités françaises.
La question de la qualité de la formation et de la recherche dans nos facultés, par conséquent de leur attractivité nationale et internationale, est vitale pour l’université française. QSF entend contribuer à la réflexion avec une note qui sera publiée dans les prochaines semaines et où seront abordés les aspects didactiques, intellectuels, scientifiques, juridiques, diplomatiques et budgétaires permettant de construire un modèle universitaire juste et attractif. C’est la seule manière de souhaiter réellement la « bienvenue dans les universités françaises » à tous les étudiants, qu’ils soient français ou étrangers.